La santé mentale ne se limite plus aujourd'hui aux seuls neurotransmetteurs cérébraux. Une révolution scientifique est en marche, dévoilant les liens complexes entre notre microbiote intestinal, nos comportements compulsifs et nos patterns de procrastination. Trois experts de renom nous éclairent sur ces mécanismes fascinants qui régissent nos émotions et nos actions au quotidien.
Le Dr. Balon-Perin, spécialiste de l'axe intestin-cerveau, Delphine Lavabre, thérapeute spécialisée en troubles obsessionnels compulsifs, et le Dr. Yorgo Hoebeke, expert en psychologie cognitive, nous révèlent comment notre cerveau, cet organe électrique de 100 000 milliards de cellules nerveuses, fonctionne bien au-delà de ce que nous imaginions.
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Votre intestin influence directement votre cerveau et vos émotions. Nos analyses spécialisées évaluent l'état de votre microbiote pour identifier les déséquilibres pouvant affecter votre bien-être mental.
Notre cerveau compte 150 000 milliards de connexions synaptiques, ces fameux points de rencontre entre neurones où sont produits les neurotransmetteurs. Mais ce que révèle le Dr. Balon-Perin bouleverse notre compréhension : notre intestin joue un rôle majeur dans la production de ces messagers chimiques de nos émotions.
"Il y a plusieurs neurotransmetteurs qui ont été impliqués dans l'anxiété et l'humeur", explique-t-il. "Pour citer les principaux, il y en a deux qui reviennent souvent : le système GABA par rapport à l'anxiété et le système sérotoninergique par rapport à l'humeur."
Le GABA (acide gamma-aminobutyrique) agit comme un véritable modulateur de l'hyperexcitabilité nerveuse. Ses récepteurs transmettent des signaux calmants qui apaisent l'influx anxieux. Mais pour que ce système fonctionne optimalement, une enzyme cruciale entre en jeu : la glutamate décarboxylase.
Cette enzyme, qui transforme le glutamate en GABA, nécessite des cofacteurs spécifiques pour fonctionner : magnésium et vitamine B6. "C'est un des liens et un de ce besoin en magnésium et en B6 contre le stress dont on parle souvent", précise le Dr. Balon-Perin.
Plus fascinant encore, certaines bactéries de notre microbiote participent directement à cette production. Le Lactobacillus plantarum, avec des souches spécifiques, possède cette capacité remarquable d'augmenter l'activité de la glutamate décarboxylase pour produire du GABA naturellement.
Lorsque notre microbiote devient inflammatoire, les conséquences sur notre santé mentale sont dramatiques. "Quand on n'a pas assez de bonnes bactéries qui protègent la paroi, trop de mauvaises bactéries peuvent être en contact avec le système immunitaire intestinal", explique le spécialiste.
Ce déséquilibre déclenche la production de messagers inflammatoires qui migrent jusqu'au cerveau. Arrivés à destination, ils perturbent la production de sérotonine à partir du tryptophane. Une enzyme, suractivée par cette inflammation, dégrade le tryptophane vers une voie alternative appelée "voie de la kynurénine", privant ainsi le cerveau de son précurseur à sérotonine.
Les études sur les souris le confirment : un microbiote optimisé avec certaines bactéries spécifiques réduit les comportements dépressifs et diminue la production de kynurénine inflammatoire.
Les recherches les plus récentes sur les psychobiotiques - ces probiotiques spécialement sélectionnés pour leur impact sur la santé mentale - montrent des résultats stupéfiants. Une étude comparative entre des souris stressées traitées avec de la fluoxétine (Prozac) et d'autres recevant un psychobiotique contenant Lactobacillus plantarum et Bifidobacterium breve révèle des performances quasi-identiques dans les tests de mobilité et de comportement.
"Le TOC, c'est toujours des gens qui sont très anxieux même s'ils n'en ont pas conscience", explique Delphine Lavabre, thérapeute spécialisée. Ces troubles obsessionnels compulsifs se manifestent par deux composantes distinctes : les obsessions (pensées intrusives) et les compulsions (actes répétitifs de vérification).
Les pensées intrusives s'accrochent avec une persistance déconcertante : peur de la contamination, crainte d'avoir commis une faute grave sans s'en apercevoir, obsessions contraires à nos valeurs morales. Ces pensées génèrent une angoisse telle que la personne développe des compulsions - des rituels de vérification qui apportent un soulagement temporaire.
L'imagerie cérébrale révèle qu'une personne souffrant de TOC présente une hyperactivation du cortex préfrontal, cette zone cruciale du contrôle et de l'inhibition. L'histoire de Phineas Gage, ce cheminot du XIXe siècle qui survécut avec une barre de fer traversant son cortex préfrontal, illustre l'importance de cette région : privé de cette zone de contrôle, il avait perdu toute inhibition sociale.
Dans cette région hyperactive du cerveau des patients TOC, la sérotonine fait défaut. "Moins il y a de sérotonine, plus l'information est perdue", explique Delphine Lavabre. Cette perte d'information crée ce besoin compulsif de vérifier, non pas parce qu'il y a réellement un danger, mais pour "vidanger ce trop-plein de cortisol".
Les Thérapies Cognitives, Comportementales et Émotionnelles (TCC) offrent une approche scientifiquement prouvée pour traiter les TOC. Cette méthode tripartite agit sur plusieurs niveaux :
Aspect cognitif : Apprendre à rationaliser et critiquer les biais cognitifs, repérer les pensées TOC et surtout les accepter comme de simples "bugs du cerveau".
Gestion émotionnelle : Techniques de respiration, relaxation (Schultz, Jacobson), cohérence cardiaque pour gérer le cortisol chronique et les pics d'intensité émotionnelle.
Exposition comportementale : La technique d'exposition avec prévention de la réponse exploite le principe d'habituation. L'intensité émotionnelle monte, fait un plateau de 20 à 40 minutes, puis redescend naturellement. "C'est ça que l'on cherche avec l'exposition", précise la thérapeute.
Delphine Lavabre intègre désormais l'approche nutritionnelle dans ses suivis : "Je suis très convaincue du lien entre l'alimentation et la santé mentale. En l'occurrence, on manque de sérotonine. Dans l'alimentation, on peut justement trouver la sérotonine et se sentir beaucoup mieux."
Cette approche holistique reconnaît que "plus on a de TOC, plus on est affaibli. Mais pour sortir du TOC, il faut de l'énergie, il faut de la force."
La procrastination va bien au-delà de la simple paresse. Le Dr. Yorgo Hoebeke la définit comme "un comportement où on va retarder à plus tard une tâche de manière volontaire, alors que ce n'est pas nécessaire, et alors que le fait de ne pas agir a des conséquences négatives."
Cette stratégie d'évitement naît de plusieurs mécanismes psychologiques complexes :
Distorsions temporelles : Surestimation ou sous-estimation du temps nécessaire pour accomplir une tâche, créant soit une fausse impression de temps disponible, soit une montagne insurmontable.
Auto-sabotage protecteur : Mécanisme paradoxal où procrastiner préserve l'estime de soi. "Si elle rate son examen, elle peut se dire que c'est parce qu'elle n'a pas étudié, pas parce que ses études ne lui correspondent pas ou parce qu'elle n'est pas assez intelligente."
Perfectionnisme paralysant : "Soit je ne fais pas la tâche, soit il faut que la tâche soit faite de manière parfaite", créant une anxiété et une frustration qui rendent la tâche impossible à initier.
Lorsque nous procrastinons, nous créons un écart entre nos actions et nos croyances. Cette dissonance cognitive génère un inconfort que notre cerveau, économe en énergie, cherche à résoudre par les stratégies les plus simples :
La stratégie la plus efficace mais la plus coûteuse reste le changement comportemental - agir enfin en accord avec nos valeurs.
"Si vous commencez la journée en regardant TikTok, Instagram, si vous mangez sucré, vous avez beaucoup de plaisir mais après le contraste va être énorme par rapport au travail que vous allez devoir réaliser", explique le Dr. Hoebeke.
Cette diète de dopamine consiste à postposer les activités hautement gratifiantes pour réduire l'effet de contraste avec les tâches moins plaisantes mais nécessaires. "On peut très vite constater la différence. Si on reporte à plus tard ces activités plaisantes, on va avoir beaucoup plus facile à se mettre en route."
L'approche du Dr. Balon-Perin privilégie une alimentation riche en fibres prébiotiques et polyphénols (fruits, légumes, thé, café, chocolat noir) tout en modérant les protéines et graisses animales. Cependant, cette approche doit être personnalisée selon le terrain individuel.
Pour les personnes souffrant de SIBO (Small Intestinal Bacterial Overgrowth), un excès de fibres aggrave la prolifération bactérienne et l'inflammation. Ces patients nécessitent une approche spécifique limitant temporairement les fibres fermentescibles.
Les oméga-3 jouent également un rôle crucial, améliorant "la plasticité des récepteurs aux neurotransmetteurs". Associés à un microbiote équilibré, ils constituent un duo thérapeutique puissant contre l'anxiété et la dépression.
Le protocole de Delphine Lavavre combine :
Acceptation des pensées : "Ce ne sont que des pensées, ce n'est qu'un bug du cerveau"
Techniques d'apaisement quotidien : Exercices de relaxation et vigilance constante pendant la période de traitement
Exposition progressive : Liste de situations d'exposition avec augmentation graduelle de la difficulté
Réponses différées : Technique consistant à retarder la vérification compulsive pour permettre l'habituation naturelle
Le Dr. Hoebeke propose une approche multi-niveaux :
Niveau émotionnel : Apprendre à "dissocier notre état (comment on se sent) et notre capacité à agir". Cultiver d'autres émotions positives : curiosité, désir de réussir, connexion aux valeurs personnelles.
Niveau cognitif : Capturer les pensées irrationnelles, nuancer les standards perfectionnistes, clarifier précisément les tâches à accomplir.
Niveau comportemental : Découper les gros projets en micro-tâches, pratiquer la "diète de dopamine", conscientiser ses patterns de procrastination habituels.
Ces trois approches convergent vers une compréhension holistique de la santé mentale où microbiote, neurotransmetteurs et comportements s'influencent mutuellement. Cette vision intégrée ouvre de nouvelles perspectives thérapeutiques combinant :
La révolution de la psychiatrie nutritionnelle et microbiologique ne fait que commencer. Comprendre que notre "deuxième cerveau" intestinal influence nos émotions, que nos compulsions naissent de déséquilibres neurochimiques spécifiques, et que notre procrastination révèle des mécanismes de protection psychologique sophistiqués, transforme radicalement notre approche thérapeutique.
Cette approche scientifique intégrative respecte la complexité humaine tout en offrant des solutions concrètes et personnalisées. Elle reconnaît que derrière chaque symptôme se cache une intelligence adaptative qui, une fois comprise, peut être redirigée vers des stratégies plus saines et efficaces.
L'avenir de la santé mentale réside dans cette compréhension fine des interactions entre notre biologie, notre psychologie et notre environnement. Car comme le soulignent nos trois experts, prendre soin de sa santé mentale commence par comprendre les mécanismes fascinants qui nous gouvernent, pour mieux les réorienter vers notre épanouissement.
Experts interviewés :
Pour aller plus loin :
Santé mentale : quels liens entre notre cerveau, nos
comportements et nos émotions ?
(0:09 - 7:21)
Le cerveau, c'est un organe absolument fascinant dont on connaît pas mal de choses, mais
encore dont on ignore énormément de choses. Mais en tout cas, ce qu'on sait, c'est que c'est
un organe électrique où finalement on a 100 000 milliards de cellules nerveuses et on considère
même 150 000 milliards de connexions synaptiques, donc ces fameuses connexions entre les
neurones, là où justement sont produits ces fameux neurotransmetteurs ou neuromédiateurs,
peu importe comment on les appelle. Et alors, les 150 000 milliards de connexions, elles ne sont
pas toutes, je dirais, destinées à l'émotion.
On sait qu'il y a différentes parties dans le cerveau, il y a trois grands cerveaux à ce niveau-là et
il y a une partie du cerveau qu'on appelle le système limbique, hippocampique, enfin bref, qui
est une zone plutôt dédiée à l'émotion. Et à ce niveau, au niveau de ces neurotransmetteurs, il y
a plusieurs neurotransmetteurs qui ont été impliqués dans l'anxiété et l'humeur. Alors, on ne
va pas tout citer, mais pour citer les principaux, il y en a deux qui reviennent souvent et qui sont
fondamentaux, c'est le système GABA par rapport à l'anxiété et le système sérotonine
énergique par rapport à l'humeur.
Et donc, en fait, si vous voulez, pour essayer d'un peu comprendre ce qu'il en est, et c'est quoi
un antidépresseur aussi, puisque finalement on parle beaucoup d'antidépresseurs, les gens,
quand on revoit les statistiques, sont assez phénoménales là-dessus. Le nombre de personnes
qui ont pris un anxiolytique ou un antidépresseur sur les douze derniers mois en France, par
exemple, c'est au moins une personne sur quatre. Et je dirais que c'est la manière dont ça
fonctionne finalement.
Eh bien, ce sont des substances qui vont améliorer soit l'affinité du récepteur pour le
neurotransmetteur, soit qui vont faire que la molécule va rester plus longtemps en contact avec
le récepteur. Alors, c'est un petit peu pour expliquer, avoir un peu une vision. Bon, je pensais au
bilboquet, mais il y a plein de gens qui ne savent pas ce que c'est le bilboquet, je crois, donc on
va plutôt parler d'autre chose.
C'est que si vous prenez un chargeur de smartphone, ça c'est plus simple, eh bien vous allez
avoir, quand vous mettez votre chargeur dans le smartphone, eh bien vous allez avoir une
connexion qui va se passer. C'est un peu la même histoire, c'est-à-dire que vous avez le
chargeur que vous mettez dans le smartphone et il faut imaginer qu'on n'est non pas un
courant électrique, mais on a besoin de la molécule qui passe de la partie chargeur à la partie
téléphone pour que l'action puisse avoir lieu. Et en fait, quand il y a un contact entre le
chargeur et son récepteur, le récepteur c'est là où on met le chargeur dedans, eh bien il faut
qu'effectivement il y ait une affinité.Bon, avec un téléphone c'est facile, mais il faudrait imaginer que dans le corps humain l'affinité
n'est pas toujours aussi simple, et donc il faut que la molécule puisse bien se lier au récepteur,
et puis on constate aussi qu'il faut que cette molécule reste un certain temps en lien avec le
récepteur pour que de cette union il y ait un courant électrique qui puisse partir de là et
continuer à transmettre l'info, en l'occurrence l'info antidépressive ou anxiolytique qui est
transmise. Pour citer les neurotransmetteurs, il y a la sérotonine, dont tu as parlé, qui est
responsable de quoi ? La sérotonine, c'est un neurotransmetteur qui est plutôt impliqué dans
tout ce qui est humeur. Il y a toutes sortes de classifications, je laisse ça aux psychiatres ou
psychologues, mais on va plutôt dire que c'est plutôt humeur et anxiété quand même.
Ce sont des dépressions anxieuses dans les manques de sérotonine, c'est aussi une
perturbation du sommeil, dans l'hyperfagie ça joue aussi par rapport au contrôle de l'appétit.
Ce sont tous des éléments qui impliquent la sérotonine. Par exemple la dopamine, ce sont
plutôt des dépressions atoniques.
On sait que la dopamine est nécessaire pour entamer les mouvements, pour l'envie, pour le
dynamisme psychologique. Là c'est plutôt la dopamine qui intervient, mais on ne va pas passer
en revue tous les neurotransmetteurs, mais le concept c'est plutôt ça. Et puis après tu as parlé
du GABA.
Oui, alors le GABA, on sait que les récepteurs au GABA vont transmettre à l'inverse, vont calmer
l'influx anxieux. Ce sont des molécules qui vont calmer l'hyperexcitabilité nerveuse et donc
quand il faut qu'il y ait suffisamment de ce GABA qui vient de se fixer sur le récepteur pour
moduler, c'est un petit peu un modulateur de l'hyperexcitabilité et donc de ce fait agissent
contre l'anxiété. Et on parle souvent du GABA, on parle souvent du glutamate.
Oui, en fait le glutamate est le précurseur du GABA et donc il existe, et ça c'est terriblement
important de comprendre, c'est que pour que ce glutamate puisse être transformé en GABA, eh
bien il y a une enzyme qui s'appelle la glutamate des carboxylases qui est une enzyme qui va
permettre justement de transformer ce glutamate en GABA et cette enzyme précisément, et
c'est ça qui est très important à comprendre, pour qu'elle fonctionne bien, eh bien il y a
plusieurs éléments indispensables. Premièrement c'est d'avoir assez de magnésium et assez de
vitamine B6, donc ceci est aussi un des liens et un de ce besoin en magnésium et en B6 contre
le stress dont on parle souvent, c'est par ce mécanisme là. Et ce qu'on sait aussi maintenant,
c'est que le microbiote, et en particulier on y reviendra, il y a une bactérie qui était bien
identifiée là-dedans qui est le lactobacillus plantarum, eh bien avec une souche spécifique en
l'occurrence dans l'étude, mais soit le lactobacillus plantarum qui a cette capacité d'augmenter
l'activité de la glutamate des carboxylases pour produire du GABA.
Et puis alors aussi, chose très importante dans les voies de communication entre le microbiote
et le cerveau, quand on a un microbiote qui est plutôt inflammatoire, et donc quand on n'a pas
assez de bonnes bactéries qui protègent la paroi, trop de mauvaises bactéries qui peuvent, si
elles atteignent la paroi, alors être en contact avec le système immunitaire intestinal, et celui-civa produire des messagers de l'inflammation. Et ces messagers de l'inflammation vont pouvoir
arriver jusqu'au cerveau. Et c'est là où au cerveau ils vont affecter la production de sérotonine à
partir du tryptophane.
Et donc en fait quand je disais que le tryptophane, il va d'abord être absorbé, puis il va migrer, il
va passer la barrière hémato-encéphalique, il va arriver dans le cerveau, et là il va servir à
produire la sérotonine. Mais là, l'enzyme, il y a une enzyme qui dégrade le tryptophane vers
une autre voie, on appelle ça la voie d'équine urénine, et bien cette enzyme-là peut être
suractivée par ces fameux messagers de l'inflammation. Et d'ailleurs il y a une étude chez les
souris qui l'a montré aussi.
(7:21 - 15:00)
On a constaté que chez des souris, on avait optimalisé leur microbiote, avec certaines bactéries,
etc. Et bien elles avaient des comportements moins dépressifs, donc on avait un effet clinique,
mais aussi la quantité d'équine urénine était moindre. Donc sans doute qu'il y avait moins
d'inflammation qui avait généré ça.
Et comment est-ce que, du coup à l'inverse, on sait que le stress peut générer ça ? Ou peut-être
explique nous un peu les différentes façons dont on peut avoir un microbiote inflammatoire ?
En fait il y a deux grandes façons, dans l'équilibre en tout cas, du microbiote. La première c'est
d'avoir un excès de bactéries qui, on le sait, lorsqu'elles sont en contact avec le système
immunitaire vont favoriser la production de messagers inflammatoires. C'est-à-dire que le
système immunitaire se dit, en étant en contact avec ces bactéries-là, enfin en tout cas avec ce
qu'on appelle les éléments pathogènes de la bactérie qui vont impacter le système
immunitaire, et bien elle va se dire, oh là là, il y a quelque chose qui ne va pas ici et ils vont
produire des cytokines inflammatoires.
A l'inverse, d'autres bactéries vont stimuler la production d'autres messages qui sont des
messages, quand le système immunitaire reçoit, on appelle ça des BAM, enfin peu importe ce
message, cette information, et bien il va plutôt produire des messagers qui vont dire, écoutez
tout va bien ici, on se calme, on ne va pas s'enflammer. Il y a vraiment tout un équilibre entre
les deux, c'est pour ça qu'on parle parfois de la veille immunitaire liée au microbiote, c'est
d'avoir quand même, d'être un peu sur le qui-vive comme ça pour savoir réagir, mais il faut que
ce soit dans un bon équilibre. Et pour ce faire, il faut qu'il y ait d'une part un bon équilibre entre
les deux types de bactéries et d'autre part, que justement cette quantité suffisante de bonnes
bactéries permette aussi de stimuler la production d'un mucus qui protège la paroi intestinale,
qui permet de ne pas avoir, au niveau du grêle c'est différent, au niveau de l'intestin grêle, on a
les bactéries en général, si tout va bien, qui traversent assez vite et donc il n'y a pas de contact
important, mais par contre au niveau du côlon, là où il y a beaucoup de bactéries qui stagnent,
il est important d'avoir une double couche de mucus, c'est une fameuse couche qui permet
d'éviter d'avoir ce contact.
Et justement, c'est là où on peut faire le lien entre d'une part des mauvaises bactéries qui onttendance à détruire ce mucus, parce que ça existe aussi, il y a des bactéries, par exemple les
bactéries qui produisent du soufre sont des bactéries qui vont détruire ce mucus. On sait aussi,
entre parenthèses, que certaines bonnes bactéries, on en a beaucoup parlé, c'est la fameuse
Ackermansia, dont on sait qu'on avait en tout cas associé le déficit avec un risque plus grand
d'obésité ou de diabète, et bien on sait maintenant aussi qu'un excès, des gens qui ont au lieu
d'avoir entre 1 et 4% par exemple de cette bactérie dans leur microbiote, qui se retrouvent avec
15%, 20%, c'est très mauvais, ça a été associé à des maladies auto-immunes au niveau rénal
entre autres, parce qu'on sait que c'était une bactérie intéressante parce qu'elle stimule le fait
de resserrer les jonctions entre les cellules, donc d'éviter le passage de molécules qui ne
devraient pas traverser, mais en excès, ça mange le mucus et donc ça détruit le mucus
protecteur. Et j'en reviens finalement à la question et le stress dans tout ça.
Les gens qui ont un stress chronique et qu'on en est au stade à un moment donné où il n'y a
plus ce fameux contrôle feedback par le cerveau sur la production de cortisol et qu'ils sont en
hypercorticisme, eh bien on sait que l'augmentation par exemple du cocorticoïde au niveau
cérébral va précisément diminuer la neurogenèse, à l'inverse de ce que font les
antidépresseurs comme par exemple la fluoxétine. Concernant les expériences faites avec les
psychobiotiques, ce qui est très intéressant c'est qu'il y a une expérience qui a été faite avec un
nouveau psychobiotique qui va sortir, qui contient justement le lactobacillus plantarum, le
bifidobactérium brevet et encore d'autres choses, on ne parle pas de ces détails, mais les
expériences ont constaté qu'en donnant ce psychobiotique chez des souris stressées, ils ont
comparé donc des souris stressées, des souris pas stressées forcément, les souris stressées, les
souris stressées à qui on donne de la fluoxétine, donc du Prozac, et des souris stressées à qui
on donne ce psychobiotique. Et dans les épreuves justement de mobilité, de nage, etc., ils ont
retrouvé quasiment les mêmes résultats avec le psychobiotique qu'avec la fluoxétine, et c'est
impressionnant.
D'une manière générale, d'avoir une alimentation plus riche en fibres, donc en prébiotiques et
en ce qu'on appelle en cobiotiques, qui sont généralement des polyphénols qu'on va retrouver
dans les fruits, les légumes, le café, le chocolat, et encore d'autres choses, le thé, et manger
moins, éviter un excès de protéines et de graisses animales, à peu près dans tous les cas, ça va
être bien. Mais c'est plus compliqué que ça, c'est beaucoup plus compliqué que ça. Vous allez
avoir des personnes qui vont avoir un microbiote excessivement fermentatif, par exemple, ce
qu'on appelle dans le SIBO par exemple, donc ce qu'on appelle le Small Intestine Bacterial
Overgrowth, c'est des gens qui représentent quand même un nombre considérable de patients
qui souffrent de l'intestin irritable, et bien c'est pas mal de ces patients.
S'ils consomment excessivement de fibres, ça ne va pas bien se passer du tout, ça va
augmenter la prolifération de ces bactéries, et entre autres, dans les bactéries du grêle, il y a
pas mal de bactéries inflammatoires qui sont capables de se nourrir de choses qui sont plutôt
bonnes pour la santé, et comme en plus l'intestin grêle n'est pas bien protégé par cette double
couche de mucus, en cas de SIBO, on n'a plus ce passage rapide des bactéries à travers
l'intestin, et donc on a un contact avec la muqueuse, et ça peut créer des perturbations de laparoi intestinale, le passage de cytokines inflammatoires, etc. Donc c'est certain que dans ce
cas-là, c'est pas du tout ces conseils simples suffiront par des gens qui ont par exemple des
microbiotes avec beaucoup de bactéries sulfidogènes, c'est ce qu'on appelle maintenant les iso,
intestinal sulfide overgrowth, et bien ces gens-là, il faut absolument éviter l'excès de soufre
dans l'alimentation, et leur donner parallèlement d'autres choses pour améliorer ou favoriser la
croissance d'autres bactéries pour équilibrer les choses, etc. Là je vous ai donné deux
exemples, mais tout ça pour dire que le fait de connaître le microbiote permet d'être beaucoup
plus pointu, mais en tout cas ce qu'on peut dire c'est qu'il est évident, et ça semble évident
maintenant, que le microbiote a un impact sur le système nerveux, sur l'anxiété, sur la
dépression, et qu'effectivement de corriger cet élément-là est un élément fondamental à
corriger pour essayer d'optimaliser la situation.
(15:00 - 18:23)
De la même manière qu'on sait aussi par exemple que les oméga-3, c'était démontré depuis
longtemps, et que le déficit en oméga-3 était mauvais, il y a beaucoup d'études qui ont été
faites sur dépression et oméga-3, parce que précisément les oméga-3 améliorent la plasticité
des récepteurs aux neurotransmetteurs, et donc c'est aussi un élément intéressant. Et donc
c'est certain que quelqu'un qui a un mauvais microbiote, une cadence d'oméga-3, ce sont deux
éléments très néfastes au niveau psychique, et c'est important je pense que les psychologues,
les psychiatres soient au courant de ça, et puissent essayer d'optimaliser leurs patients, en
même temps qu'ils vont les traiter avec des médications, parce que bon, il ne faut pas non plus
être naïf, il y a des situations psychologiques où ce n'est pas en améliorant le microbiote dans
les oméga-3 que ça va suffire bien sûr, mais il est évident que je pense que c'est un élément à
considérer sérieusement, et à prendre en charge en même temps que le traitement classique.
Donc déjà, il faut voir que c'est un trouble anxieux, c'est toujours des gens qui sont très anxieux
même s'ils n'en ont pas conscience, et ce sont des pensées intrusives, des pensées qui
s'accrochent, qu'on n'arrive pas à stopper, qui sont très angoissantes, ça va être la peur de la
saleté, ça va être la peur d'avoir fait quelque chose de grave et de ne pas s'en être rendu
compte, la peur de la contamination, souvent ce sont des obsessions qui reviennent, qui
peuvent être totalement à l'encontre de nos valeurs, et dont la personne n'arrive pas vraiment
à stopper.
Et puis il y a une autre partie, ce sont les compulsions. Les compulsions, ce sont des moyens de
vérifier que la pensée est vraie ou pas, des moyens de vérifier qu'il n'y a pas eu telle ou telle
problématique, et la personne se sent obligée de faire quelque chose alors qu'elle trouve ça
souvent ridicule, qu'elle a conscience que c'est irrationnel. Vraiment des situations qui peuvent
être vraiment intrigantes pour quelqu'un qui n'a pas un toc.
Quand j'étais, la première fois que j'ai été confrontée, que j'ai vu pour de vrai quelqu'un qui
avait un toc, ça m'a vraiment intriguée. La personne sortait de sa chambre en hôpital
psychiatrique, elle avait besoin de faire trois pas, de revenir en arrière, de toucher la poignée,
de faire trois pas, de revenir en arrière, de toucher la poignée. Donc c'est vrai que c'estvraiment très intriguant.
On s'interroge pourquoi cette personne, quel est le processus cognitif qui l'amène à faire ça.
Voilà, c'est vrai que pour les personnes qui n'ont pas de tocs, ça peut être vraiment très
intriguant. Les gens qui ont des tocs sont vraiment très angoissés par ces pensées et ça c'est
vraiment le point commun à tous.
Mais il y a les tocs de vérification, la personne va être obligée de vérifier dans sa tête si elle a
bien fait quelque chose et ça va être une habitude qu'elle va mettre en place. Il va falloir qu'elle
fasse toute une série de choses avant de pouvoir dormir par exemple. Après on va avoir les tocs
de contamination, c'est une personne qui va par exemple acheter un poulet, elle va être obligée
de le passer à la javel avant de le manger.
(18:23 - 36:44)
Des choses complètement irrationnelles. Les tocs de couple aussi, on est beaucoup confronté
aux tocs de couple, ce sont des personnes qui ont peur de ne plus aimer la personne avec qui
elles sont et qui sont presque persuadées que c'est le cas et qu'il faut qu'elle le vérifie. Donc ça
va être des personnes qui vont vérifier dans les messages, mais des messages qu'elles ont
écrits il y a deux ans.
Donc elles vont passer en revue tous les messages pour vérifier qu'il n'y a pas eu à un moment
donné une pensée qui était déjà là, qu'elles n'ont pas vu. Bon ça peut aller très très loin, mais
en fait il y a vraiment une multitude de tocs qui existent. Il y a les pensées intrusives aussi qui
sont vraiment des fois... des fois on peut même faire un toque du toque, c'est-à-dire que quand
on a traité un toque, le toque peut se déplacer et des fois j'ai un patient qui va lui toquer sur le
fait que pour sortir du toque on doit faire telle chose, telle chose, telle chose et qui va lui faire
finalement un toque du toque.
C'est ça qui fait un toque de sortie du toque. Voilà, donc les toques prennent une multitude de
formes et ça met vraiment le point commun c'est que toutes les personnes sont vraiment en
détresse. Des personnes qui comprennent qu'elles ont un toque mais qui n'arrivent pas du tout
à s'en sortir et puis pour d'autres c'est beaucoup plus insidieux.
Ça va être une personne qui va me dire voilà, moi j'ai vraiment beaucoup de ruminations
mentales, je suis très anxieuse et quand elle me décrit les ruminations, en l'occurrence hier
justement le toque de couple, est-ce que... est-ce que j'ai regardé quelqu'un dans la rue ? Donc
il y a la confusion entre la pensée, le fait de regarder et le fait que ce soit quelque chose de
grave ou pas qui appelle à l'action donc ça veut dire que j'ai eu envie de la personne et elle va
ruminer là-dessus. Et en fait elle ne s'aperçoit même pas que derrière il y a des vérifications
pour sortir de cette angoisse en fait. Souvent ça va être des gens qui arrivent sans comprendre
qu'ils ont des toques.
En fait si on met une personne sous IRM, une personne qui a un toque, on va voir que la zonedu cortex préfrontal est hyperactivée, contrairement à une personne qui n'a pas de toque. Et
dans les années 1800, il y a un cheminot, Phineas Cage, je l'ai souvent cité cette expérience,
cette situation en fac de psycho, il y a un cheminot qui a pris une barre de fer dans le cerveau et
en fait au départ on a cru que la zone du cortex préfrontal ne servait à rien parce qu'en fait il
continue à fonctionner et on s'est rendu compte que non justement. Il était devenu grossier, il
n'inhibait pas tout ce qu'il avait à dire et en fait la zone du cortex préfrontal c'est la zone du
contrôle, c'est la zone de l'inhibition.
Et quand au tout départ on a donné des antidépresseurs aux gens qui avaient des toques, on
s'est rendu compte que ça les atténuait en certains cas. Pourquoi ? Parce qu'en fait dans cette
zone du cerveau, pour les patients qui ont des toques, il va manquer la sérotonine qui est
l'hormone de la sérénité et qui est un neuromédiateur qui permet de faire passer l'information
d'un neurone à l'autre. Donc là, en l'occurrence, moins il y a de sérotonine, plus l'information
est perdue.
Et du coup, la personne en fait, va avoir ce besoin de vérifier, de compulser, mais ce n'est pas
parce qu'il y a quelque chose de grave qui se passe, c'est juste pour vidanger ce trop-plein de
cortisol en quelque sorte. Et plus elle va se mettre à compulser, plus ça va être appris comme
une habitude, comme un comportement qui fonctionne et du coup le cerveau va renvoyer ce
besoin. Et du coup, on rancle dans la boucle infernale.
Les patients sont amenés à prendre des antidépresseurs comme une béquille, mais il ne faut
pas quand même que la dose soit trop importante parce que si on enlève le toque, eh bien on
n'a pas réglé la façon de le traiter. Pour moi, il faut créer les sillons pour pouvoir guérir pour
qu'en cas de rechute, parce que dans un contexte d'anxiété, de déménagement, d'arrivée d'une
enfant, on peut se retrouver à avoir à nouveau des toques. Si vous ne l'avez pas réglé, vous ne
pouvez pas en sortir.
Tandis que si on l'a réglé une fois, ça on peut garder à l'esprit qu'on y arrivera toujours. Ce sont
les TCC qui ont été prouvés scientifiquement, ce sont les thérapies cognitives,
comportementales et émotionnelles. Donc d'un point de vue cognitif, on va apprendre à
rationaliser, à critiquer ces biais cognitifs, à repérer les pensées toques et à essayer de les
accepter surtout.
Alors les accepter, là on passe sur l'émotionnel. On va apprendre à la personne à gérer ce que
ça lui fait dans son corps. On va lui apprendre des techniques de respiration, de relaxation,
comme la relaxation de Schultz, la relaxation de Jacobson, la cohérence cardiaque.
Et puis surtout, gérer quand ça vient comme ça dans la tête. En fait, il y a deux aspects. C'est
gérer le cortisol dans le sang au quotidien, le cortisol chronique, arriver à s'apaiser au quotidien
et arriver à gérer la pensée aussi quand ça vient et que ça devient vraiment trop élevé,
l'intensité de l'émotion.
Et puis après, en thérapie cognitive, comportementale et émotionnelle, il y a aussi l'aspectcomportemental avec la technique d'exposition, avec prévention de la réponse. L'intensité de
l'émotion ne monte pas au ciel. Elle monte, elle fait un palier, souvent de 20 à 40 minutes, et
après elle descend.
Ça, c'est le principe d'habituation. Donc la personne, en fait, mettons qu'elle ait un coup de fil
pendant qu'elle a envie de compulser, ça peut passer complètement. Du coup, c'est ça que l'on
cherche avec l'exposition, avec prévention de la réponse.
C'est-à-dire, la personne va lister des situations à laquelle elle va s'exposer de façon
progressive, elle va s'exposer à ses pensées et elle va essayer de s'apaiser et petit à petit
augmenter la difficulté. Il y a une autre technique, c'est l'exposition avec réponses différées,
c'est-à-dire, je sais que j'essaie de penser, eh bien je vais attendre pour vérifier. Donc un
patient, par exemple, celui qui fait du TOC du TOC, il va me dire, voilà, Delphine, est-ce que si
j'ai cette pensée et que je l'accepte, ça veut dire que je vais sortir du TOC, est-ce que tu peux me
valider si c'est vrai ou pas ? Donc, clairement, il est dans la vérif, mais son TOC lui fait croire que
ce n'est pas le cas.
Donc là, je vais lui dire, voilà, je t'envoie la réponse demain à 18h, par exemple. Voilà, est-ce que
c'est bon pour toi ? Et d'ici là, essaye de t'apaiser pour ne pas avoir à la regarder. Ce qui est
souvent le cas, en fait, je trouve que moins on en parle et moins il prend l'importance.
Parce que si on considère que c'est le petit enfant capricieux, en parler, c'est lui donner de
l'importance et c'est avoir beaucoup plus de pensée intrusive. Donc déjà, essayez de ne pas
trop en parler. Acceptez aussi le fait que ce ne sont que des pensées.
Bien se rappeler que ce n'est qu'un bug du cerveau. Et surtout, il y a beaucoup de pensées, je
suis fou, donc ça, vraiment remonter l'estime de soi. Et puis, ça va être un investissement de la
personne.
C'est à dire que tous les jours, elle doit faire des techniques de relaxation et que tous les jours,
elle doit être restée vigilante et attentive pendant cette période où on travaille pour diminuer le
TOC. Et voilà, je déconseille vraiment d'arrêter de travailler, même pour ceux qui sont dépassés,
parce qu'arrêter de travailler, c'est encore donner trop d'importance au TOC et ça le fait revenir
encore plus fort. Je suis très convaincue du lien entre l'alimentation et la santé mentale,
puisque à titre personnel, pour avoir changé mon alimentation, je me trouvais avec beaucoup
plus d'énergie.
Et là, en l'occurrence, on manque de sérotonine. Donc, depuis très peu de temps, je dis à mes
patients, faites attention à ce que vous mangez, parce que dans l'alimentation, on peut
justement trouver la sérotonine et on peut se sentir beaucoup mieux. Puis, essayer de repérer
les gros stresseurs.
Et puis, je ne sais pas, par exemple, quelqu'un qui, à nouveau, déTOC parce qu'il va se marier,
prendre un wedding planner. Quelqu'un qui est en train de faire un achat important d'unappartement, peut-être le différer. Essayer de repérer pour justement être le plus apaisé
possible, pour avoir le plus de force possible, parce qu'il en faut vraiment.
C'est ça la problématique, c'est que plus on a de TOC, plus on est affaibli. Mais pour sortir du
TOC, il faut de l'énergie, il faut de la force. Et c'est vrai que l'alimentation, ça, c'est vraiment très
important.
Et c'est très récent, on ne le dit pas assez. Dernier message, c'est que, je le redis, je l'ai déjà dit,
mais souvent, ce sont des personnes qui sont très intelligentes, qui savent très bien quand la
pensée vient. Quand elle n'est pas encore passée dans le cortex préfrontal qui dysfonctionne,
elles savent que c'est une pensée dysfonctionnelle, une pensée de TOC.
Donc, reprendre confiance pour retrouver cette force, pour ne justement pas être impacté par
ces pensées. Vous pouvez avoir confiance en vous. La procrastination, elle est problématique.
Et en recherche, on voit qu'elle est liée à... Donc, plus on procrastine, moins on va avoir
d'accomplissements réels dans la vie de tous les jours. Au plus bas va être notre estime de soi.
On va aussi avoir plus d'émotions négatives.
Et ça affecte aussi notre santé, parce qu'on va postposer des comportements. Par exemple, le
fait de manger bien, de bien dormir, de faire du sport. Ou par exemple, on va procrastiner sur
le fait de prendre rendez-vous chez le dentiste.
Et donc, ce qui va augmenter la probabilité de procrastiner, c'est par exemple tout un tas de
pensées. Comme le fait de surestimer ou sous-estimer les conséquences positives à long terme.
Et on va penser que aux conséquences positives à court terme, de reporter ses tâches.
On n'imagine pas les conséquences futures. On va aussi peut-être sous-estimer ou surestimer
le temps que va prendre une tâche. Et par exemple, si on a un mois pour faire une tâche, et
qu'on sous-estime le temps qu'elle va prendre, on peut se dire, j'ai tout le temps du monde, je
vais la faire dans trois semaines, pas de souci.
Et puis on se retrouve face à la tâche, on se dit en fait, elle est beaucoup trop compliquée. Je me
suis un peu voilé la face. Et pareil, si on surestime le temps que va prendre une tâche, on en fait
toute une montagne.
Par exemple, si je pense que nettoyer la salle de bain va prendre trois heures, bien sûr que je
n'ai pas envie de nettoyer la salle de bain. Alors que peut-être que si je m'y mets, c'est fait en
une demi-heure. Quoi d'autre ? On peut aussi s'auto-saboter pour préserver son estime de soi.
C'est-à-dire que la procrastination va alors venir remplir un besoin qui est de bien se sentir à
propos de soi-même. Par exemple, je connaissais quelqu'un qui procrastinait par rapport au
fait d'étudier pour ses examens. Et en parlant un peu avec elle, on s'est rendu compte que si
elle n'étudie pas pour ses examens, si elle rate alors son examen, mais elle peut se dire que
c'est parce qu'elle n'a pas étudié.Pas parce que ses études lui correspondent pas ou parce qu'elle n'est pas assez intelligente.
Mais si elle ne procrastinait pas et qu'elle étudiait, et qu'alors malgré tout son anxiété se
révélait être vraie, elle rate son examen. Mais là, peut-être qu'elle serait blessée dans son
estime de soi.
Et enfin, s'il y a tout un tas de pensées irrationnelles qui sont par exemple liées au
perfectionnisme, qui va être par exemple de se dire que je ne peux pas faire d'erreur dans mon
devoir. Soit je ne fais pas la tâche, soit il faut que la tâche soit faite de manière parfaite. Tout ça
va rendre la tâche soit impossible à réaliser, et donc on n'a pas envie de commencer une tâche
qui nous paraît impossible, soit elle va créer beaucoup d'anxiété et de frustration.
Et je pense une dernière chose aussi, c'est tout simplement un manque de clarté en quoi
consiste la tâche. Donc là, dans ces cas-là, il vaut mieux clarifier exactement ce qu'il faut faire,
parce que sinon on a une anxiété par rapport à une tâche diffuse. Et tant qu'on ne sait pas
exactement ce qu'il faut faire, c'est normal d'avoir cette incertitude, d'avoir de l'anxiété.
Et il suffit alors de séparer en petites tâches la grosse tâche, le projet, et se mettre en route.
Alors il y a une façon très simple, ou en tout cas plutôt catégorique, de définir la
procrastination. C'est un comportement où on va retarder à plus tard une tâche de manière
volontaire, et alors que ce n'est pas nécessaire.
Donc c'est-à-dire qu'on va procrastiner, on dit que c'est de la procrastination quand on n'agit
pas, alors que rien ne nous empêche d'agir sauf nous-mêmes, et alors que le fait de ne pas agir
a des conséquences négatives. Donc là, c'est vraiment de la procrastination. Par exemple, on va
avoir de l'incertitude par rapport à une tâche, on va avoir de l'anxiété sur comment la faire, on
va avoir de l'anxiété par rapport au fait que peut-être qu'on ne va pas la faire bien, et on ne va
pas répondre à nos propres standards.
Et donc, face à cet inconfort, on va vouloir l'éviter. Et donc là, on va adapter la stratégie de
procrastiner. Le problème avec l'évitement, et ça vaut pour d'autres problèmes en psycho-
oscille, quand on va par exemple consommer de l'alcool pour éviter certaines émotions, c'est
que c'est une solution temporaire à court terme.
Et donc, la cause même de notre inconfort n'est pas résolue. Et donc, ça peut même entretenir
la peur de ce qu'on évite. Donc par exemple, si on a procrastiné sur une tâche spécifique, le fait
de l'éviter peut même augmenter notre anxiété future par rapport à cette tâche, ce qui va
augmenter notre probabilité de procrastiner.
Le fait de procrastiner peut en plus nous mettre dans une situation plus inconfortable. Par
exemple, si c'est un devoir pour lequel j'avais une semaine, si je le reporte à demain, le
lendemain j'ai encore moins de temps pour le faire. Il me dit que c'est encore plus impossible.
Et donc là, l'anxiété augmente au fur et à mesure qu'on procrastine davantage et que la
deadline se rapproche. On peut ressentir ce qu'on appelle en psycho une dissonance cognitive.Donc par exemple, si on s'est dit qu'on allait faire cette tâche, par exemple, si on s'est dit qu'on
allait courir ce matin, bien qu'on procrastine là-dessus, on va avoir un écart entre ce qu'on
voulait faire et ce qu'on fait exactement.
Il y a un écart entre nos actions et nos croyances, nos buts. Et il va y avoir une dissonance
cognitive. Et on a plusieurs façons, en tant qu'humain, de réagir à cette dissonance, de faire
qu'on se sente mieux.
Et l'humain, il veut économiser son énergie, donc il va essayer de chercher d'abord les
stratégies les plus simples. Ça peut être par exemple la distraction. On va tout simplement faire
une autre activité pour oublier le fait qu'on n'a pas agi en accord avec nos valeurs ou nos
croyances.
On peut aussi essayer d'oublier cet épisode, soit de manière passive, soit activement éviter d'y
penser. On peut aussi essayer de minimiser la situation. Par exemple, si j'ai procrastiné sur le
fait d'étudier, alors même que ces études sont importantes pour moi, peut-être qu'en fait je
peux minimiser l'importance de ces études et donc procrastiner devient moins problématique.
Minimiser, on peut relativiser aussi, dire que j'ai procrastiné aujourd'hui mais c'est pas grave, il
y a encore trois semaines avant la deadline, et hop, tout à coup on se sent mieux, il y a moins
de dissonance. On peut aussi nier notre responsabilité. Peut-être qu'on peut se dire qu'hier
soir, quelqu'un a fait du bruit jusqu'à pas d'heure, on a mal dormi, et donc c'est pas grave si je
travaille pas aujourd'hui, c'est pas ma faute, je suis juste fatigué, je vais me reposer et je
travaillerai là-dessus plus tard.
Donc il y a aussi le fait, on peut chercher à s'auto-affirmer, donc c'est-à-dire qu'on peut se
rassurer en se disant, ok j'ai pas fait ce que je voulais faire, j'ai pas agi en accord avec mes buts,
ou mes valeurs, ou mes croyances, mais j'ai quand même ces côtés positifs là, et du coup on se
réaffirme en tant que personne, comme notre intégrité. Et enfin, la dernière façon dont on peut
réagir à une dissonance, c'est de changer notre comportement. Donc avant, on a vu, on peut
changer nos croyances, minimiser par exemple l'importance de nos études, on peut éviter le
fait d'y penser, mais la dernière façon de changer la dissonance, c'est de changer nos
comportements pour qu'ils reviennent en lien, en accord avec nos valeurs, nos croyances, etc.
Mais ces dernières stratégies, c'est celles qui nous demandent le plus d'effort, et c'est pour ça
que c'est pas celles qui nous viennent naturellement. Mais l'important, c'est de conscientiser le
fait qu'on procrastine. Savoir soi-même, par exemple, se faire une liste des comportements, des
tâches pour lesquelles typiquement on va procrastiner, pour qu'on soit prêt à anticiper en
quelque sorte, et puis mettre en place les stratégies dont je vais parler.
On peut aborder ça sous le plan émotionnel. Donc on a vu qu'on procrastine pour éviter de
l'inconfort, une émotion négative. On peut pratiquer le fait, justement, d'accepter, accueillir le
fait qu'on se sent mal, et au lieu de céder à l'impulsion de se débarrasser de cet inconfort,
essayer plutôt de passer outre, et de se dire que je ne dois pas avoir envie de faire la tâche pourpouvoir la faire.
En gros, apprendre à dissocier notre état, comment on se sent, et notre capacité à agir. Et pour
nous aider avec ça, on peut aussi faire appel à d'autres émotions. Donc par exemple, si on a de
l'inconfort ou de l'anxiété par rapport à une tâche, on peut essayer de se rappeler à notre
attention pourquoi on veut faire cette tâche, pourquoi elle est importante, quelles
conséquences positives au long terme aura le fait de faire cette tâche maintenant, comment
elle est en lien avec nos valeurs.
On peut aussi faire appel à notre curiosité, notre intérêt, le désir de réussir. Et donc tout ça, ça
peut nous aider à changer notre état émotionnel. Il y a aussi le fait, sur le plan cognitif, on peut
aussi essayer de capturer toutes les pensées irrationnelles dont j'ai parlé un peu plus tôt.
Par exemple, si on a des standards trop élevés, il faut essayer de les nuancer. Et tout ça,
évidemment, je le dis de manière très rapide, toutes ces stratégies, mais c'est par exemple un
travail qu'on peut réaliser avec un psychologue. Un psychologue peut nous aider à moins
procrastiner et à travailler sur ces distorsions cognitives.
(36:44 - 37:14)
Il va y avoir des impacts directs et indirects. Généralement, l'impact direct, c'est que bien qu'à
court terme on le fait pour se sentir mieux, malgré tout il va y avoir la culpabilité. Alors même
qu'on procrastine en espérant de se sentir mieux, mais tout de suite après on peut ressentir de
la culpabilité, on peut avoir une moins bonne estime de soi parce qu'on va se mettre le label de
procrastinateur, c'est négatif, on peut être autocritique et là on peut ruminer sur le fait qu'on
procrastine.
(37:15 - 39:23)
Donc ça c'est plutôt les effets directs. A long terme, ça peut entretenir du stress, on se met
toujours dans des situations inconfortables où on a moins de temps pour bien faire notre
travail. Alors on va avoir plus de stress, on va aussi moins bien faire notre travail, ce qui va
impacter négativement notre estime de soi, notre confiance en soi.
Et donc c'est vraiment des petits comportements mais qui au long terme peuvent vraiment
avoir un effet boule de neige et entretenir une mauvaise estime de soi, enfin une estime de soi
négative, dérumination et aussi avec le stress qui s'accumule, impacter notre immunité. La
question de la dopamine, je pense qu'on en parle souvent tous les jours, en fait c'est quand on
fait une tâche dont on retire beaucoup de plaisir ou qui répond à une certaine motivation, on
vulgarise en disant que c'est une tâche qui nous donne beaucoup de dopamine. Par exemple,
scroller sur TikTok, répondre à des notifications, regarder une série, si on compare ça au fait
par exemple de lire, d'écrire ou de répondre à des emails, le contraste est énorme dans le
plaisir qu'on a dans cette tâche.
Et donc l'idée c'est d'un peu de faire une diète de dopamine, si je peux le vulgariser en quelquesorte ainsi, en faisant attention à la dopamine qu'on mange au cours de la journée. C'est à dire
que si vous commencez la journée en regardant TikTok, Instagram, en répondant à plein de
messages, en plus de bonnes nouvelles de potes, si vous mangez sucré, si vous regardez une
série qui vous fait rire, vous avez beaucoup de plaisir mais après le contraste va être énorme
par rapport au travail que vous allez devoir réaliser. Donc l'idée c'est de se dire qu'on va
postposer ces activités plaisantes, cette dopamine pour plus tard dans la journée.
Et comme ça, on peut très vite constater la différence. Si on reporte à plus tard ces activités
plaisantes, on va avoir beaucoup plus facile à se mettre en route parce qu'il y aura moins cet
effet de contraste face à des tâches plus chiantes.